Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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vendredi 26 août 2011

Metello - Mauro Bolognini (1970)


Metello Salani naît à Florence en 1872. Sa mère morte en couches, il est élevé par de pauvres paysans chez qui son père, un ouvrier sablier anarchiste, l'a mis en nourrice peu avant de mourir dans un accident de travail. Il n'a pas vingt ans quand il retourne dans sa ville natale où, adopté par les amis anarchistes et socialistes de son père, il devient maçon.

Parmi les grandes réussites de Bolognini, Metello prolongeait les préoccupations sociales de ses œuvres conçues avec Pasolini tout en s'inscrivant dans la lignée de leur dernière collaboration en commun, La Viaccia. Ce dernier film marquait le virage de Bolognini pour la grande adaptation littéraire et le film en costume. Pourtant si la La Viaccia était le reflet des drames sociaux sombres et résignés de l'époque (à l'image de Rocco et ses frères, Mamma Roma), Metello est bien différent. Au moment de la sortie du film, l'Italie a entamé ses douloureuses "Années de Plomb" où durant une décennie le pays vivra au rythme des attentats et des revendications des extrémistes de tous bords. Adapté d'un roman de Vasco Pratolini, Metello n'est donc pas un choix innocent pour Bolognini qui use du contexte d'époque comme d'un miroir adressé au présent afin de le prévenir des dérives du passé.

L'histoire nous dépeint donc le destin du jeune Metello (Massimo Ranieri) qui se voit dès son plus jeune âge lié aux soubresauts sociaux de son époque. La formidable séquence d'ouverture le voit encore nourrisson perdre sa mère épuisée au gré d’une énième provocation de son père ouvrier anarchiste qui ne tardera pas à succomber également. Tout est alors fait pour éloigner Metello de Florence et de toute influence politique mais la vie et le sang bouillonnant en lui en décideront autrement. Toute l'intrigue à travers les différentes rencontres et actions menée par Metello laisse constamment entendre que notre héros en dépit de ses efforts va suivre le même funeste chemin que son père.

Une initiative noble mais que Bolognini teinte constamment d'ambiguïté. Au départ jeune ouvrier cherchant simplement à subsister Metello se trouve rapidement confronté aux injustices les plus cruelles, entre salaires de misère et répression violente d'un gouvernement à la solde des patrons. Bolognini interroge pourtant le jusqu'au boutisme des ouvriers et de leur mouvement, que ce soit le Parti incapable de les soutenir financièrement en temps de grève ou de la notion de groupe primant sur l'individu sous l'apparente fraternité et camaraderie ouvrière...

Le patron tel que dépeint ici n'a d'ailleurs rien du despote inhumain et exploiteur, plutôt un homme soumis à la loi du marché. Metello lui-même n'est pas exempt de reproche lorsqu'il délaisse son épouse (Ottavia Piccolo) pour sa belle voisine, une bourgeoise méprisant tous ses principes. Les moyens de moins grandes envergures (c'est particulièrement criant sur l'ellipse où Metello effectue son service militaire) offrent paradoxalement une plus grande authenticité à la reconstitution de Bolognini, toujours épaulé par le fidèle chef décorateur Piero Tosi.

Sans atteindre tout à fait la perfection plastique de Bubu de Montparnasse à venir l'année suivante, Metello par sa sobriété distille une tonalité nostalgique et mélancolique à cette Florence du XIXe (soulignée par le beau générique en noir et blanc où le score romantique de Ennio Morricone) et rend palpables les milieux modestes traversés.

La photo diaphane d'Ennio Guarnieri associée aux cadrages de Bolognini confère certaines vues absolument somptueuse, véritable tableaux en mouvements témoins d'une la recherche picturale constante. Massimo Ranieri, chanteur de variété reconverti acteur est parfait de fougue, de hargne et de passion dans ce premier rôle. Il véhicule un charme et une authenticité qui l'humanise et fait comprendre les différents errements de son parcours vers une forme de sagesse.

Le couple qu'il forme avec Ottavia Piccolo sera si convaincant que Bolognini les réunira à nouveau dans Bubu de Montparnasse l'année suivante. Les moments les plus délicats du film leurs sont réservés, notamment la relation épistolaire par laquelle se noue leur amour ou encore l'appel des femmes nommant leurs hommes à l'extérieur de la prison. Cette question autour du choix entre convictions politique et famille sera plus prononcé encore dans le futur Liberté, mon amour.

C'est autour d'eux et de leur réunion que se situe le vrai enjeu du film, savoir si Metello réitéra les errements de son père et mènera sa famille à sa perte. Les revendications politiques obtenues de haute lutte passent ainsi au second plan quand arrive la séquence finale dont le mimétisme parfait avec celle d'ouverture fait le lien entre passé et présent, pour une issue qui annonce des lendemain plus apaisés.

Disponible en dvd zone 2 chez SNC/M6 Vidéo


Extrait du magnifique générique de début

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