Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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jeudi 22 mars 2012

Christmas in July - Preston Sturges (1940)



Un jeune homme, Jimmy MacDonald, a participé à un concours de slogans organisé par une marque de café et espère gagner un des prix, le premier étant de 25 000$. Ses collègues décident de lui faire une farce en lui faisant croire qu'il a gagné le concours. Jimmy décide d'acheter plein de cadeaux pour sa famille dont le premier sera une bague pour sa fiancée Betty Casey.


Preston Sturges réalisait avec Christmas in July un de ses films les plus ouvertement touchant, lui qui avait l’habitude de ne dévoiler sa sensibilité que par intermittence (la dernière partie des Voyages de Sullivan, le dilemme du héros de Hail the conquering hero) sous une loufoquerie toujours plus prononcée. Cette émotion si ouvertement révélée, il faut la chercher dans les origines d’un projet que Sturges s’efforça de mener à bien. Le film est au départ une pièce de théâtre, A Cup of Coffee écrite en 1931 par Preston Sturges mais jamais jouée sur scène (si ce n’est des lustres plus tard en 1988). Flairant le potentiel de l’histoire, Universal tente de transposer celle-ci au cinéma et Sturges encore scénariste entrevoit presque la possibilité de passer enfin derrière la caméra mais là encore le projet s’enlise.

La suite est plus connue : scénariste vedette au sein de la Paramount, il devient le premier de sa profession à Hollywood à passer réalisateur (ouvrant la voie à un Wilder dans la même situation) grâce au succès immense de Gouverneur malgré lui (1940). Désormais tout puissant grâce à ce hit, Sturges oblige la Paramount à racheter son script à Universal et pourra enfin mettre en scène cette histoire qui lui tient tant à cœur pour son second film.

Comme d'habitude avec ce raconteur d’histoires, un pitch qui repose sur une idée redoutable. On a ainsi un couple de héros diablement attachant formé par un Dick Powell aspirant publicitaire ambitieux en attente du coup de pouce qui lui donnera enfin sa chance et sa fiancée aimante et le soutenant en toutes circonstances jouées par la charmante Ellen Drew. La tendresse avec laquelle Sturges les dépeint, ainsi que leur entourage évoque la description des braves gens simple du Lubitsch de The Shop around the corner. La belle première scène des amoureux sur le toit alors que les voisin râlent alentour dépeint en quelques minutes leurs rapports et leurs attachements par la grâce de l’écriture de Sturges et de l’alchimie des deux acteurs.

Du coup quand intervient le quiproquo où ils se croient riche, on ressent constamment une petite pointe de tristesse face à leur emballement pour cette embellie factice. Sturges a tellement bien fait exister ces personnages et fait partager leurs espoirs qu'il ne peut tourner à réellement à la farce et au grotesque leur fausse réussite.

C'est donc les personnages secondaires qui assurent la part de délire cartoonesque et survolté dont le jury du concours de slogan tordant ou encore un Raymond Malburn cabotin en donateur à la poursuite de son chèque. Sous couvert d'humour le scénario dresse un portrait grinçant de l'hypocrisie suscitée par la réussite par cette vision de comportements changeant d'une minute à l'autre durant tout le film envers Dick Powell selon qu'on le croit en réussite ou pas. La séquence la plus manifeste étant son patron se mettant à débiner ses slogans qu'il adorait un instant auparavant quand il le croyait vainqueur du concours.

Le cynisme de The Great McGinty n’est pas loin et il y avait certainement moyen de tirer vers encore plus de noirceur vu la tournure de la situation. Sturges préfèrera réserver un sort plus honorable à ses héros, voire plus avec une astucieuse et attendue pirouette finale. Même si on vante souvent Sturges pour ses concepts alambiqués et inventifs dans la comédie, il faisait déjà ici la preuve de l’émotion dont il était capable. On en aurait la démonstration quelques années plus tard avec The Great Moment, son plus beau film et son plus grand échec à la fois.

Disponible dans le coffret zone 1 consacré à Preston Sturges et doté de sous titres français. Pour les anglophones, ce même coffret est trouvable sur amazon pour 20 euros à peine avec uniquement des sous titres anglais. Sorti aussi en zone 2 français chez Bac Film.

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