Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mardi 17 juin 2014

Five Star Final - Mervyn LeRoy (1931)


Face à un tirage déclinant, l’impitoyable rédacteur en chef Joseph Randall (Edward G. Robinson) cherche une première page racoleuse pour relancer son journal. Prêt à tout, il va jusqu’à déterrer les morts et sortir de l’anonymat Nancy Townsend (Frances Starr), qui avait abattu son amant il y a 20 ans.

Five Star Final constitue une des charges les plus cinglante envers la presse à scandales et les tabloïds, et dont la noirceur marque durablement. Le film est adapté d'une pièce de théâtre à succès jouée à Broadway et écrite par Louis Weitzenkorn et inspirée de sa propre expérience au sein du New York Evening Graphic, fameux tabloïd des années 20 dont il fut un temps le rédacteur en chef. Dès lors le film dans les écarts les plus abjects de ses protagonistes se verra doté d'une sorte de cynisme pragmatique faisant froid dans le dos, un constat réaliste désespéré plus qu'une satire. Se déroulant sur une courte période de deux jour, le récit est celui d'une mise à mort annoncée et publique, une corrida médiatique dont une innocente sera la victime.

Face à son tirage déclinant, le rédacteur en chef du journal Joseph Randall (Edward G. Robinson) décide de faire du neuf avec du vieux en déterrant un faits divers s'étant déroulé vingt ans plus tôt. La secrétaire Nancy Voorhees (Frances Starr) avait ainsi tué son patron qui l'avait séduite, mise enceinte et refusé de l'épouser. Acquittée en raison de son état, Nancy a depuis refait sa vie avec un homme ayant accepté d'adopter sa fille Nancy (Marian Marsh) qui ignore tout de ce passé et s'apprête à épouser le fils d'un riche industriel. Toute cette existence paisible retrouvée va alors voler en éclat sur l'autel du sensationnel LeRoy s'attarde surtout sur l'absence d'états d'âme de la rédaction.

Le choix est de ne pas représenter e fustiger les lecteurs, mais surtout les dirigeants du journal pour lesquels il ne représente que des chiffres de tirage à faire fructifier par les "informations" les plus crapoteuses possibles. Les dommages collatéraux sont tout aussi abstrait pour eux, la malheureuse Nancy ne représentant qu'une proie de plus qu'ils vont s'employer à dépecer en s'introduisant dans son quotidien pour mieux l'exposer au grand jour pour rompre l'anonymat tranquille dans lequel elle vivait. Lorsque cette réalité s'invite à eux et est susceptible d'éveiller leur culpabilité, ils la fuient à l'image de ce terrible spit-screen où Nancy tente en vain de joindre au téléphone les dirigeants du journal afin de les supplier de la laisser en paix.

Tous les personnages sont absolument ignoble chacun dans un registre bien spécifique, le cynisme le plus prononcé avec Hinchecliffe (Oscar Apfel) se drapant de morale préventive pour briser une vie, le répugnant et manipulateur Isopod (Boris Karloff). Joseph Randall est sans doute le plus coupable de tous car le plus conscient du mal qu'il fait (constamment culpabilisé par la conscien incarnée par sa secrétaire que joue Alin McMahon), s'abaissant à une dernière atrocité (publier des photos de morts) avant de lâcher prise et vaciller va aux conséquences de ses actes. Edward G. Robinson rend magnifiquement la complexité d'un homme ayant fini de se bercer d'illusions d'un vrai journalisme finit par aller plus loin que les plus sinistre vautours qui l'entoure. Le final lui accorde un semblant de seconde chance mais l'on a du mal à être dupe et cela semble juste une astuce pour ne pas conclure le film sur une note sinistre.

Frances Starr est magnifique de vulnérabilité, résignée et qui résoudra son dilemme de la plus injuste de façon avec son époux (H. B. Warner tout aussi poignant et dont la dernière scène est terrible). Les conséquences sur les lecteurs et l'entourage restent au niveau intime aussi avec la réaction outrée des beaux-parents nantis de Jenny plus gênés des répercutions mondaines que de la détresse de la jeune fille. Là aussi la noirceur totale attendue est évitée de justesse lors de la confrontation finale. La dernière image résume parfaitement le caractère éphémère, immonde et vain qui a animé l'ensemble lorsque le journal et son contenu ayant causé tant de drame est le soir même balayé et recouvert de boue dans un caniveau. Tout cela pour faire sensation dans l'édition du soir.

Sorti en dvd zone 2 français chez Warner dans la collection Trésor Warner consacrée au Pré-Code

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