Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mardi 15 novembre 2016

Violent Playground - Basil Dearden (1958)

Détective ambitieux de Liverpool, le sergent Truman (Stanley Baker) est nommé contre sa volonté Officier en charge des affaires juvéniles. Il se retrouve ainsi à s’occuper de deux jumeaux de sept ans qui volent régulièrement dans les boutiques. Truman rencontre leur grande sœur Cathie (Anne Heywood), mère de substitution, dont il tombe amoureux, et leur frère Johnny (David McCallum). Ce dernier joue les caïds auprès des autres jeunes, et pourrait bien être mêlé à une série d’incendies.

Basil Dearden collabore pour la première fois avec le producteur Michael Relph au sein du studio Ealing pour le film historique Saraband for Dead Lovers (1948) et surtout pour les deux polars The Blue Lamp (1950) et Pool of London (1951). Ce sont ces deux derniers qui posent les bases du fructueux partenariat à venir entre Basil Dearden et Michael Relph lorsqu'ils quitteront Ealing. Dans une série de films signés entre la fin des années 50 et le début des années 60, on retrouve donc en plus appuyé cette veine sociale et surtout un attrait pour les sujets difficiles dans Sapphire (1959) traitant du racisme ou Victim (1961) de l'homosexualité. Violent Playground lance donc le cycle avec comme sujet la délinquance juvénile.

On perd grandement du côté hard-boiled des films Ealing avec cet ancrage social, les méfaits des jeunes gens relevant plus de leur détresse que d'une vraie entreprise criminelle savamment organisée. Le film s'ouvre avec la mutation du sergent Truman (Stanley Baker) aux affaires juvéniles. Le charisme et la présence taciturne de Stanley Baker suffit, sans le voir forcément à l'œuvre pour établir le background de flic dur à cuire de Truman. Après dix ans à mener les affaires les plus dures et traiter avec les criminels les plus féroces, c'est avec dépit qu'il accueille cette "promotion". Dès lors c'est également à son apprentissage d'une certaine patience, art de la conciliation et en définitive d'un humanisme du personnage que l'on assiste dans les problématiques qu'il aura à traiter. Ce manque d'expérience se ressent quand il devra s'occuper de deux jumeaux de sept ans volant dans des boutiques, son "interrogatoire" se focalisant sur le frère alors que c'est bien la sœur sous ses airs innocents la meneuse. Il découvrira leur environnement familial difficile auprès de la grande sœur Cathie (Anne Heywood) qui les élève et le grand frère Johnny (David McCallum), vrai caïd du quartier et possiblement mêlé à une série d'incendie sur lesquels Truman enquêtait.

Le scénario entremêle une certaine naïveté avec une noirceur très prononcée. Ainsi Truman tombé amoureux de Cathie tente parfois maladroitement de ramener les jumeaux et Johnnie sur le droit chemin, porté par l'idéalisme du directeur de l'école et le prêtre joué par Peter Cushing qui voient des bons garçons et des âmes à sauver parmi les délinquants. A l'inverse les autres collègues policiers ne verront que des criminels à punir (ce sera particulièrement explicite lors du final) plutôt que êtres en souffrances. Cette dualité fonctionne aussi dans le traitement des délinquants et plus particulièrement un excellent David McCallum en meneur instable.

L'environnement dépeint des maux bien connus avec cette cité Gerard Gardens à Liverpool, bâtiment de luxe à sa construction dans les années 30 et désormais un véritable ghetto et nid du déterminisme social. Johnny hésite donc constamment à se laisser porter par ce cadre et ses mauvais penchants et une vraie volonté de repentir, de mener une vie normale. La voie tragique semble cependant inéluctable, une série d'incompréhension et de malentendus ainsi que le tempérament d'écorché vif de Johnny l'éloignant toujours de la rédemption possible. Parfois néanmoins le film se montre un peu caricatural notamment lors de la scène la plus controversée du film où Truman fait face à une horde délinquants menaçant entamant une véritable transe désinhibée sur fond de rock'n'roll, la musique du diable ou pas loin.

On retrouve l'approche réaliste de Dearden notamment avec la population multi ethnique (un jeune asiatique et sa sœur - les vrais frères et sœur Michael Chow et la future James Bond Girl Tsai Chin - malmené par les caïds) de cette cité de Liverpool dont il se déleste de toute imagerie cliché - building sinistres, ruelles désolées et squares déserts sans aucune vue ou évocation de La Mersey. Le drame culmine lors d'un final choc où cette hésitation entre humanisme et rigorisme est mise à rude épreuve. Sans trop en dire Dearden y ose une tension psychologique et une violence assez inouïe qui annonce un fait divers sanglant en Angleterre avec le massacre de Dunblane en 1996, ce qui rendra le film un temps invisible. La conclusion est très touchante, synonyme de tragédie et d'espoir à la fois notamment une très belle dernière scène où Truman assume désormais son rôle de guide pour les jeunes en difficultés. Encore une belle réussite de Dearden.

Sorti en dvd zone 2 anglais sans sous-titres

Extrait

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